jeudi 24 juin 2010

Le Trollhätte Kanal

Le Trollhätte Kanal constitue la dernière partie de la traversée de la Suède d’Est en Ouest. Il comprend en fait un canal construit par l’homme d’une longueur de 10 km et l’aval de la rivière Göta (Göta Älv), sur 72 km. Il est donc plus intéressant de franchir le canal d’Est en Ouest, car nous profitons du courant de la rivière, que nous avons mesuré en moyenne à 1 nœud.
Le nom de Trollhätte, le chapeau de l’ogre, vient sans doute du fait que le mont qui porte ce nom ferme le lac Vänern et le maintient à 50 mètres d’altitude. La rivière Göta permet au surplus d’eau de s’écouler via Göteborg dans la Mer du Nord. Sur un territoire relativement plat, le dénivelé d’environ 35 m à Trollhättan, la ville qui se situe peu après la jonction entre le canal et la rivière, est très important. Une chute d’eau renommée s’y formait. Des moulins en ont utilisé l’énergie depuis plusieurs siècles, et la première et plus importante centrale électrique suédoise a été bâtie ici au début du XX° siècle, canalisant la chute d’eau (les chutes d’eau ne sont visibles qu’un jour par semaine en juin, une fois par jour en juillet et août).
Le besoin de relier le lac Vänern à la Mer du Nord par une vois navigable s’est fait sentir très tôt. La construction d’un système d’écluses a été entreprise dès 1742. Mais la technologie de l’époque ne permettait pas de résister aux fortes pressions créées par le dénivelé. Un premier système a fonctionné dès 1800, mais avec des écluses très étroites, qui sont devenues obsolètes lors de l’ouverture du Göta Kanal. Un deuxième système a donc était inauguré en 1844, avec des écluses du même type que celles du Göta Kanal. Mais alors que l’utilisation commerciale du Göta Kanal a rapidement été interrompue, il s’est avéré qu’il était nécessaire de permettre à de plus gros bateaux d’emprunter le Trollhätte Kanal. Un troisième système d’écluses y a donc été ouvert en 1916.
L’ensemble du canal comprend aujourd’hui 6 écluses : une près de son entrée et du lac Vänern, 4 écluses juste au Sud de la ville de Trollhättan, et une écluse une quinzaine de nautiques plus au Sud. Le canal est d’abord destiné aux cargos (transportant essentiellement du bois et/ou du papier ou du pétrole), et toute l’infrastructure leur est dédiée. Plus de 1200 cargos l’empruntent chaque année, et ils sont bien entendu prioritaires lors des éclusages. Ceci entraîne une grande différence avec le Göta Kanal qui est au service des plaisanciers.
Mardi 22 juin en arrivant à l’entrée du Trollhätte Kanal en début d’après-midi, nous étions donc un peu anxieux ! L’entrée nous a parue immense après le Göta Kanal, le temps gris vaguement humide, le vent et le caractère plutôt industriel de l’endroit pas franchement accueillants. Le premier pont était fermé : un contact par radio VHF nous a informés d’une attente de plusieurs minutes. Le vent était assez fort, et nous avons tenté de nous amarrer à un « ponton » pour cargo, puisqu’il n’y en avait pas à notre dimension. Impossible : tout était à une autre échelle, et le vent aidant nous avons renoncé. Heureusement, le délai annoncé a été respecté, et après quelques tours au moteur, nous avons pu traverser. Encore deux ponts routiers passés sans trop de difficulté, et nous rejoignons la rivière Göta. Elle assez large, ouverte au vent, que nous prenons de face à 15 nœuds... A notre arrivée, la première écluse étant fermée, nous avons été rassurés de trouver un ponton à notre échelle pour nous amarrer. D’autant que nous y avons retrouvé notre équipage allemand, tout aussi inquiet que nous. Mais à deux, tout est plus facile. Nous avons tenté de joindre les opérateurs via la radio VHF : pas de réponse. Nous sommes allés à pied à l’écluse nous renseigner : au pied d’une tour de contrôle, un grillage fermé… L’écluse nous a paru immense (90 m sur 14 m) après celles du Göta Kanal. Et après un certain temps, nous avons vu arriver notre premier cargo. Plus de question de priorité : le bateau remplit l’écluse, nous sommes tout-à-fait d’accord pour la lui laisser tout entière ! L’éclusage a bien duré 20 minutes, et nous a permis de prendre des photos et de bien observer l’écluse remplie et vide… Quand notre tour est venu, nous avons été rapidement rassurés : si le système est fonctionnel et un peu froid, la manœuvre est facile. Ou facile à partir du moment où l’on a réussi à amarrer le bateau, car les systèmes d’attache sont faits pour les cargos, et ce qui pourrait nous servir est le plus souvent sous la surface de l’eau lorsque l’écluse est remplie. Mais ça se fait, et finalement les éclusiers sont plutôt patients. Ensuite, le niveau de l’eau diminue sans aucune secousse, tout en douceur, et il suffit de laisser glisser l’amarre (si elle est suffisamment longue car le dénivelé peut dépasser les 7 ou 10 mètres) : facile !
Encore un pont ferroviaire, et nous arrivions en haut de la ville de Trollhättan, où est situé un petit port de plaisance, Spikön : nous avions bien rempli notre journée, et nous y sommes arrêtés, de concert avec « notre » bateau allemand. L’endroit n’a rien de particulièrement attractif, et la ville en elle-même non plus, mais Birgitta et Göran nous ont rejoints à bord pour quelques jours, et la soirée a été fort occupée.
Notre départ du lendemain n’est donc pas particulièrement matinal. Mais notre programme de navigation consiste essentiellement à passer les 4 écluses de la ville… Et il faut beau temps ! Lorsque nous nous présentons à la première écluse, nous apprenons qu’un cargo est annoncé en bas de la quatrième : il est prioritaire. Nous avons donc le temps d’amarrer le bateau et de commencer une promenade aux alentours, puis d’assister au 4° éclusage du cargo : encore plus impressionnant que celui de la veille. Celui-ci est rouge, et nous faisons remarquer au pilote que notre bateau l’est aussi. Une conversation s’engage, qui nous permet d’apprendre qu’il va chercher des grumes et du papier pour les îles Canaries, qu’il s’agit d’un chemin qu’il fait très régulièrement, et que les dimensions du bateau ont été fixées en fonction de celles des écluses du Trollhätte Kanal.
Deux heures après notre départ, nous avions donc bien fait 500 mètres ! Et grosse déception, à peine le cargo sorti du l’écluse, les portes se refermaient… Appel VHF : les remous sont tels après la sortie du cargo qu’il faut attendre 5 bonnes minutes avant que les bateaux de plaisance puissent y entrer… C’est enfin notre tour. Nous sommes seuls dans cette écluse, un peu perdus et le serons dans les trois suivantes : 12000 m3 d’eau manipulés pour nous (mais le tarif du canal est à la hauteur). Les 3 écluses du bas sont construites en escalier, enserrées entre deux pans de montagne dans lesquelles elles ont été ouvertes à la dynamite : le site est encore plus impressionnant, mais la manœuvre toujours aussi facile… dès qu’on est amarré !
A 15 heures nous nous amarrions juste en bas des écluses, dans un endroit idyllique : vert, ensoleillé, calme… Et fort intéressant d’un point de vue historique, géologique et technologique. Toutes les tentatives d’écluses ou anciennes écluses y sont visibles, des sentiers permettent de visiter le site, ses beautés naturelles, la trace des anciens moulins, la centrale électrique propose des visites guidées (nous sommes arrivés quelques minutes trop tard…), il y a des explications partout, et en anglais, bref, c’est magnifique et extrêmement bien mis en valeur.
Et, de plus, nous avons rencontré de nouveau le couple de Suédois qui nous avait accueillis à Spiken, et qui était toujours intéressé par notre bateau. Nous avons même profité de leur barbecue ! Donc une excellente après-midi, une superbe soirée ensoleillée, pour un départ de bon matin jeudi !
Aujourd’hui, nous avons atteint la fin du canal, et nous sommes amarrés dans le port de Göteborg. Nous avons passé la dernière écluse sans problème. Les paysages qui étaient magnifiques au Sud de Trollhättan, se sont aplatis, mais sont restés verdoyants. Puis la rivière s’est élargie, et en approchant de Göteborg, les rives sont devenues peu à peu plus industrialisées. Mais globalement, nous n’avons pas trouvé que le Trollhätte Kanal était si laid !



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6 commentaires:

  1. Alain BENEDICTUS25 juin 2010 à 12:56

    28° sous le soleil et les embouteillages du périph. Les derniéres soirées de la Mission se préparent avec un repos bien mérité pendant les vacances. Cette année nous seont à Pleubian la derniere semaine de juillet et les deux premiéres semaines d'Aout. Nous serons tous les deux, sabs les petits enfants. Vous serez où à ce moment là?
    Maintenant que vous êtes à Goteborg, vous allez redescendre par la côte Ouest ou bien vous en profiterez pour faire un tour au Danemark?

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  2. on va vers le nord à la jonction Suède-Norvège. On fait les courses à la frontière en Suède et on fonce en Norvège (c'est très cher...)

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  3. alain benedictus27 juin 2010 à 09:17

    Impressionnant les écluses! Comment faites vou pour décrocher l'amarre? Suffit juste de tirer non?

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  4. Quelle surprise de voir un voilier francais dans l'archipel de Göteborg. Nous vous avons vu hier jeter l'ancre à Djupsundsholmarna (Les îlots au détroit profond) et notre curiosité nous a fait chercher et trouver ce blog. J'ai pris une photo que je vais essayer de joindre ce commentaire.

    Bonne suite de votre croisière nordique!

    La famille dans le voilier Aphrodite 101

    Daniel Vinge
    d.skonerten@bahnhof.se

    (Je n'arrive pas à joindre la photo que j'ai pris)

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  5. Merci Daniel pour vos encouragements. On a été bien surpris que quelqu'un en Suède lise notre blog.
    Notre adresse est : daniels.kerfriden@free.fr

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  6. Pour Alain qui se demande comment on décroche l'amarre en haut de l'écluse ; elle est passée en double sur un barreau d'échelle ou sur une bitte d'amarage. Il suffit donc de tirer dessus pour la récupérer sur le pont.

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