mardi 9 juin 2009

Frises dédaignées et canal de Kiel apprécié

Nous sommes donc partis vendredi 5 juin vers le Nord puis l'Est, par vent de Nord-Est (voyez-vous ce que je veux dire ? Vent dans le nez...), pour longer les îles de la Frise, vers l'embouchure de l'Elbe et le canal de Kiel. Ces îles épousent le dessin de la côte néerlandaise (puis allemande) et créent des "eaux intérieures" qui permettent aux plaisanciers locaux de naviguer, car la côte elle-même est tout à fait inhospitalière. Mais pour se glisser entre ces îles, il faut se présenter avec la marée montante, et pour en sortir, attendre la marée descendante. Les chenaux intérieurs ne sont souvent praticables qu'à marée haute... Bref, beaucoup de paramètres à prendre en compte et une avancée d'autant ralentie. Or, notre objectif reste la Suède !
Le début de la navigation depuis den Helden, contre vent et courant est un peu fatigant, et la mer complétement vierge de tout voilier. Mais les cargos sont là pour nous tenir éveillés, ainsi de temps en temps qu'une plateforme pétrolière. Puis le vent devient instable : une réduction de voilure s'impose dans un premier temps, puis le "vent Volvo" (moteur) devient nécessaire. Et alternativement : nous entretenons nos musculatures, mais le courant de marée est enfin avec nous. La mer est calme : nous décidons d'en profiter pour naviguer de nuit : tant pis pour les Frises ! A 22h30, le vent nous abandonne pour 12h. La nuit est étoilée, la lune rousse : la visibilité est étonamment bonne, et lorsque je prends mon quart à 3 h du matin, le jour se lève !
C'est bôôôô !
Nous espérons pouvoir atteindre l'Elbe dans les temps pour y entrer avec le courant de marée... Espoir déçu par le vent qui se lève en milieu de matinée : dans le nez ! Mais le temps est toujours agréable.
Un changement de route de 90° vers le Nord, et nous voilà à Helgoland, une petite île allemande, vers 14h. Cette île vit essentiellement du tourisme : les ferries amènent des quantités impressionnantes de passagers, qui se ruent sur les nombreux magasins d'alcool, de tabac et de parfums "duty-free". Mais après le départ de ces bateaux (18h), tout ferme. Alors, pas question pour nous de se reposer ou de déjeuner...
Nous devons faire le plein de gas oil, car le canal de Kiel nécessite une douzaine d'heures de moteur, et remplir le frigo d'abord.
Nota : la station service est à 800 m du bateau, nous disposons d'un bidon de 20 l, et il nous faut au moins 60 l de gas oil : c'est cela aussi la voile !
C'est donc épuisés, mais très contents, que nous nous attablons vers 18h devant une assiette XXL de poissons grillés variés. Autant vous le dire, le couvre-feu a été décrété très tôt sur le bateau. D'autant que l'amarrage s'est fait à couple : 4 bateaux amarrés les uns aux autres, et que le plus proche du ponton a annoncé son départ pour 8h le lendemain matin... Ce qui était d'ailleurs raisonnable pour profiter du courant favorable dans l'Elbe. Grasse matinée interdite, donc.


Dimanche 7 juin sera donc la grande journée, dont nous parlons depuis au moins 6 mois : navigation dans le canal de Kiel, qui nous permettra de quitter la mer du Nord pour la Baltique. Et, autant vous le dire, ce n'est pas trop tôt ! La gestion des courants nous pèse...
Les conditions météo sont favorables, le vent nous permet de monter l'ensemble de nos voiles (mais au près). Quelques virements de bord musclés sont nécessaires pour suivre la première partie du chenal dans l'estuaire de l'Elbe, la fin se fait au moteur car le vent est orienté précisément dans la direction du chenal, qui se rétrécit entre des hauts-fonds et nous rapproche des cargos. L'estuaire est immense, et en trompe l'oeil : il propose une vaste étendue d'eau apparemment libre, alors que les bancs de sable sont omni-présents. L'eau est d'un jaune peu appétissant : limon ? sable ? la igne de côte industrielle, et le soleil voilé.
Nous entrons dans le canal par une écluse, avec quelques gros bateaux et un autre voilier, allemand. Heureusement, car le personnel de l'écluse ne parle que l'allemand, et qu'il braille les instructions dans un haut-parleur : aucune chance de comprendre quoi que ce soit !
A l'imitation, nous passons l'écluse sans encombre. Les règles du jeu : laisser les gros bateaux entrer et s'amarrer, attendre un beuglement en allemand et une lumière blanche, entrer rapidement et s'amarrer (sur un ponton au ras de l'eau qui nécessite des pare-battage à la surface de l'eau), et dès que l'autre porte s'ouvre, se ruer à l'extérieur, pour éviter les flux d'eau créés par les cargos alors qu'ils redémarrent, qui pourraient être désagréables pour nos coquilles de noix.

Que le canal est ensuite reposant ! Quelques kilomètres entre des rives industrialisées, puis la nature prend le dessus : arbres, chant des oiseaux, vols de canards... interrompus régulièrement par le passage de cargos, porte containers et autres ferries. Le canal mesure 100 km, et est large d'environ 150 m). Quelques ponts (tirant d'air : 40 m : pas de pb pour notre mât de 17 m) et de nombreux bacs qui permettent de relier les deux rives pour les locaux. Vers 18h, nous arrivons à la première "aire de stationnement" autorisée pour les bateaux de plaisance. Ces aires sont nécessaires, car la navigation de nuit leur est interdite sur le canal. Une douzaine de pieux délimitent des emplacements, mais ils sont trop étroits pour PikouRous : nous nous amarrons en travers, et passons une nuit reposante, bercés par les oiseaux, en compagnie de deux autres voiliers.

lundi, en poursuivant notre route, nous croisons un voilier polonais dont l'équipage nous adresse de grands signes. Au milieu d'un flot de paroles, nous comprenons que leur moteur est "kaput", et qu'ils souhaitent que nous les prenions en remorque. C'est vrai, l'embarcation est en piteux état... En chevaliers héroïques, nous ne manquons pas de nous exécuter, mais sur quelques kilomètres seulement, jusqu'au prochain arrêt répertorié, car le remorquage nous coûte en temps et en gas-oil. Ce n'est pas ce qu'espérait l'équipage polonais qui préfère que nous le lâchions au milieu du canal pour continuer sa route à la voile, plutôt que de s'amarrer... Mais il démontre une grande reconnaissance, et nous offre une bouteille de vin blanc (débouchée) "pour les hommes" [de quoi je me mêle ?] et une icône pieuse pour protéger le bateau pour la dame ! Gentil...

La sortie de l'écluse côté Kiel est un jeu d'enfants (nous grandissons vite), et nous nous amarrons dans la marina de Laboe, quelques nautiques au Nord de Kiel vers 16h.

C'est là que l'autre histoire commence. Nous sommes le 8 juin... mon anniversaire. Et, la tradition chez nous pour les anniversaires consiste à confectionner un gâteau au chocolat et aux amandes. Mais, je suis intolérante au gluten (donc pas de farine de blé), et Göran est allergique à tout ce qui est noix, noisettes ou amandes... Pas d'idée, et pas d'énergie... Il y a un resto à côté de la capitainerie : j'essaie de demander s'il leur est possible de nous concocter un gâteau sans gluten pour trois : le serveur semble avoir compris et me répond par l'affirmative... J'ai cependant un doute... Et effectivement, après un excellent plat de poisson, c'est dans le bateau et sur des fraises (allemandes et excellentes) que je planterai et soufferai mes bougies !


Ce matin, nous étions prêts à repartir, quand le dernier bulletin météo nous a refroidis : non seulement vent dans le nez (notre équipier, qui sent l'écurie, nous avait promis des "civilized waters" dans la Baltique, sans courant, avec beau temps, bon vent...), mais aussi pluie dans la journée, voire orages. C'est ainsi que je peux mettre à jour le blog : il pleut à verse, mais nous sommes au chaud et au sec dans le bateau, et la capitainerie a résolu le problème de connexion à Internet d'hier ! La Baltique, nous la verrons demain...

dernière blague idiote : lorsque l'un d'entre nous souligne son contentement à être dans le bateau, dans le port et à l'abri par ce temps de cochon (I'm happy...), le second ajoute "I'm happy, too [two]", et le dernier, "I'm happy, three" !

Un petit mot du capitaine qui dit qu'il a remplacé un taquet coinceur de rail de foc et une vis de chandelier cassée. En un peu plus de 1000 miles parcourus depuis port la Forêt, c'est pas mal. Le RM se comporte parfaitement dans ces mers courtes même s'il a tendance à taper face à ces vagues.
Le radar est toujours aussi inefficace mais l'AIS est génial dans ces conditions de navigation au milieu des cargos. C'est un plus évident en terme de sécurité, ne consomme que 0.25Ah mais ne "voit" que les bateaux qui émettent en AIS, c'est à dire les gros dangeureux...
Au bilan technique, le RM se révèle un fabuleux bateau, confortable, rapide et sûr. La trinquette est la voile la plus utilisée actuellement. Le capitaine est donc content.

8 commentaires:

  1. Heureusement que nous avons toutes les étapes de la métamorphose pilaire du capitaine ! Je ne le reconnaîtrais bientôt plus sur les photos :-D
    For the three of you, I'm happy... four ! (intraduisible donc)
    Go, Pikou !

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  2. Pas de blague pour "five" ... je suis en panne ... non pas de gasoil mais d'idées ...LOL...
    Cool la barbe ... le vrai capitaine ...
    Sympa les fraises avec bougies ... et un gâteau avec de la maïzena ... Dois-je tenter et demander à mes collègues de goûter ???
    Je m'étonne à suivre votre itinéraire sur une carte petit à petit ... mais le Monde est encore bien grand !!!
    Bonne continuation,
    MPS

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  3. Dans la litanie des jeux de mots anglphones idiots, je vous suggére le dialogue suivant à entamer dés que l'occasion se présente:
    -"Hello! How do you do...glas fairbanks junior? (Douglas Fairbanks Junior)
    -"Very well and you...l brinner? (Yul Brinner)

    C'est le premier qui réussi à placer la réplique (Very well...) qui gagne. Chaque victoire vaut 1 point. Celui qui aura le plus grand nombre de points lorsque votre viking vous quittera gagnera l'image pieuse des polonais! :-))

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  4. Bonjour, je dois bientôt aller chercher un bateau en mer Baltique, pouriez vous me donner qualques infos concernant le passage par le canal de Kiel (distance, arréts possibles, points de ravitaillements...)Merci d'avance!
    dav_alex@hotmail.com

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  5. Bonjour et bravo pour votre périple.
    Pensez vous possible ce parcours par le canal de Kiel dans les jours qui viennent, pour rejoindre Copenhague depuis la Hollande?

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  6. Bonjour et bravo. En vous lisant, je lis un rêve.
    Je connais la Mer du Nord, ce canal de la Mer du Nord à la Baltique et la Baltique. Je suis amoureuse de ces régions du Nord allemandes où ils fait bon vivre.
    J'aime être sur l'eau, j'aime aller en bateau, et vous par votre histoire bien sympathique, vous m'emmener dans un rêve.
    Je vous admire...C'est super...
    Je vous souhaite encore beaucoup de plaisir.
    Annie

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  7. Bonjour, je doit emmener un bateau au danemark en septembre;Pourriez vous me donner des infos sur le canal de kiel je vous donne mon mail
    olivier.sm@wanadoo.fr

    merci

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  8. Bonjour!Devant ramener un voilier de 7m en France, pourriez-vous me dire à peu près le tarif ,car les infos du site du canal de Kiel ne sont pas très claires? Merci de votre réponse au marechalpaul@hotmail.fr

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